ORGANIZACIÓN PARA EL FOMENTO DE LOS ESTUDIOS INTERNACIONALES

CAUSES PRINCIPALES DES MIGRATIONS AFRICAINES EXTRACONTINENTALES

Auteur: Roméo Gbaguidi. Enseignant-chercheur. Directeur de LemAfriQ

RÉSUMÉ

La migration est un phénomène qui ne laisse personne indifférent et qui se perçoit, sous certains cieux, comme une question prioritaire. Il s’avère important de remarquer que la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest est en avant-garde des questions migratoires contemporaines, dès lors que cette sous-région du continent africain constitue l’une des zones principales de départ des candidats à l’immigration clandestine actuellement recensés dans le continent européen.

Malgré les spécificités intrinsèques de chaque Etat, les causes profondes des migrations extracommunautaires voire extracontinentales africaines semblent être communes à tous les pays de départ des migrants. Nous rappelons donc ici quelques-unes des principales raisons qui poussent les filles et fils de l’Afrique à vouloir abandonner leurs origines, bravant toutes sortes de contraintes et/ou obstacles. Et nous offrons quelques caractéristiques générales des migrants subsahariens candidats à la migration clandestine vers l’Europe.

Mots clés : Migrations africaines, causes de départ, CEDEAO, migrants subsahariens

ABSTRACT

Migration is a phenomenon that leaves no one indifferent and which is perceived, under certain skies, as a priority issue. It is important to note that the Economic Community of West African States is at the forefront of contemporary migration issues, since this sub-region of the African continent constitutes one of the main areas of departure for irregular immigration candidates currently identified in the European continent.

Despite the intrinsic specificities of each state, the underlying reasons of extra-community or extra-continental African migrations seem to be common to all the countries of departure of migrants. We therefore remind here some of the main reasons that push the daughters and sons of Africa to abandon their origins, braving all kinds of constraints and obstacles. And we offer some general characteristics of sub-Saharan migrants who are candidates for illegal migration to Europe.

Keywords : African migration, causes of departure, ECOWAS, sub-Saharan migrants

Contextualisation

Les mobilités humaines ont toujours constitué une forme évidente de l’expression de la liberté des peuples à la recherche de nouveaux sites d’établissement pouvant sécuriser leur situation, à la fois économique, politique, sociale et juridique. La migration est devenue, dès lors, une question prioritaire, avec plus de 272 millions de migrants internationaux aujourd’hui (OIM, 2020). Le continent qui manifeste le plus d’inquiétudes face à ce phénomène social universel est sans doute l’Europe. En effet, selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), plus de 363.000 personnes sont entrées de manière irrégulière dans l’Union Européenne en 2016.

Cependant, force est de constater que l’Afrique, en général, et la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), en particulier, est en avant-garde des questions migratoires contemporaines, constituant de fait l’une des zones principales de départ des candidats à l’immigration clandestine actuellement recensés dans le continent européen. Il faut rappeler, cependant, que l’Afrique de l’Ouest n’est pas étrangère aux mouvements de populations. Car, par sa position stratégique entre l’Afrique du Nord et les zones tropicales, ainsi que son ouverture sur l’Océan Atlantique et les Amériques, elle a toujours été le théâtre d’intenses mobilités et de brassages de populations.  C’est pour cela qu’à partir du Sommet de la Valette sur la migration, tenu en novembre 2015, qui a reconnu que la gestion des migrations relève de la responsabilité commune des pays d’origine, de transit et de destination, la CEDEAO a adopté une position commune qui a conduit à la prise de nombreuses initiatives qui continuent d’être développées pour répondre aux défis migratoires. Il s’agit, par exemple, de l’adoption du protocole portant code de citoyenneté, le carnet de voyage, le passeport et la carte d’identité biométrique. Au titre des défis, il faut noter l’application des dispositions des instruments pertinents de la Communauté en matière de libre circulation de personnes et de biens, l’accentuation de la lutte contre les réseaux de passeurs et trafiquants de migrants en détresse, et la création (progressive et effective) dans chaque État membre d’un cadre inclusif de dialogue national sur la migration.  

Au regard de cet environnement propice qui constitue un champ d’étude à ciel ouvert, nous voudrions rappeler quelques causes fondamentales des mobilités extracommunautaires voire extracontinentales des africains.   

Raisons principales des migrations subsahariennes extracontinentales 

Lorsqu’une personne assume le risque d’émigrer, c’est parce qu’elle est convaincue qu’il existe un grand espoir d’améliorer sa vie présente, et cette espérance est comme un moteur qui se met en marche pour réaliser le grand saut, non pas physique en kilomètres, mais plutôt émotionnel. La migration crée, évidemment, un ensemble d’opportunités aussi bien pour les migrants que pour les pays concernés, ayant la capacité d’offrir une amélioration des conditions de vie, ainsi que l’acquisition de nouvelles compétences et perspectives d’emploi. Faudrait-il aussi souligner que c’est un droit humain qui, dans la tradition historique africaine, était considérée comme un rite d’initiation pour passer à l’âge adulte. Mais, si déjà toute mobilité suppose faire des efforts, car “partir, c’est mourir un peu”, les contours d’un déplacement sans garantie et basée sur la clandestinité sont encore plus difficile d’imaginer. Dès lors qu’une telle migration, soit elle est vécue en première personne, soit à travers des témoignages directs et objectifs pouvant permettre d’appréhender certains cas.

Malgré les spécificités intrinsèques de chaque Etat, les causes profondes des migrations extracontinentales africaines semblent être communes à tous les pays de départ des migrants. Il ne sera jamais de trop de rappeler quelques-unes des principales raisons qui poussent les filles et fils de l’Afrique à vouloir abandonner leurs origines, bravant toutes sortes de contraintes et/ou obstacles. Soulignons aussi que les migrations ont toujours été clairement liées aux moyens de subsistances, aux catastrophes naturelles et climatiques, ainsi qu’aux différentes crises.

De façon plus énumérée, les raisons généralement avancées sont, entre autres:

  • La recherche de meilleures conditions de vie ou même de survie;
  • Le manque d’opportunités réelles d’emploi, pour les jeunes notamment;
  • L’inadéquation des compétences professionnelles au marché du travail local;
  • Le poids de la tradition et les facteurs sociaux;
  • La réunification des membres de la famille, notamment en ce qui concerne les femmes;
  • La situation politique (instabilité politique de certains pays de la région); attaques et persécutions sélectives (ethniques, orientation sexuelle, idéologie politique ou religieuse); corruptions sous différentes formes, injustices sociales (classicisme); etc.
  • Les obstacles ou restrictions pour l’obtention de visa d’entrée en Europe, notamment dans la zone Schengen.
  • Le mirage de l’El Dorado (image irréaliste sur les chances d’obtenir le droit d’asile en Europe; les fausses facilitées de trouver un emploi bien rémunéré en un temps record; les supposées possibilités de se marier à un/e européen/ne pour ainsi “gagner” ses papiers; etc.);
  • Les réseaux mafieux et trafiquants de migrants (passeurs et autres intermédiaires donnent une “fausse” image de l’Europe); sans oublier non plus les informations fournies par certains migrants qui ont réussi à atteindre l’objectif visé par les candidats et qui, le plus souvent, maquillent la réalité de leur vie actuelle dans les nouveaux pays de résidence; en plus des opinions des familles, des amis et des réseaux sociaux.

Ces raisons nous conduisent à présenter, très brièvement, les caractéristiques générales des migrants subsahariens candidats à la migration clandestine vers l’Europe.

Profil général des migrants subsahariens

Une immense majorité des migrants subsahariens, c’est-à-dire plus de 80%, sont âgés de 18 à 40 ans, avec une moyenne d’âge de 27 ans, selon le rapport de l’OIM sur les migrants de retour de mai 2017 à mai 2018.  Il faut remarquer que sur le plan statistique des questions migratoires africaines il reste encore beaucoup à faire. Le manque de données réelles et actualisés sur les migrants fait que les informations les plus objectives, jusqu’à présent, ne sont que celles concernant les migrants de retour. Et même à ce niveau, les chiffres ne coïncident pas souvent lorsqu’ils sont présentés par différentes institutions qui s’intéressent au phénomène. En tout état de cause, et sur la base de quelques études empiriques, nous pouvons encore affirmer que les migrants sont aussi pour la plupart célibataires et ont grandi en milieu urbain, ayant donc leur résidence habituelle dans la capitale du pays d’origine avant le départ. Il s’avère intéressant de remarquer que plus de 65% de ces derniers ont été scolarisés, ayant divers niveaux d’éducation au moment de décider sur la réalisation du voyage. Un aspect aussi important, à notre avis, est qu’une très grande majorité, plus de 80%, avait un emploi rémunéré avant le départ, ce qui lui permettait de disposer de fonds propres pour migrer. A ceci, il faut ajouter que le projet migratoire individuel et personnel se transforme souvent, très rapidement, en un projet familial ou communautaire. Tout le monde apporte ce qu’il peut pour qu’un des membres de la communauté puisse réaliser ce projet dont les bénéfices futurs sont supposés rejaillir sur tous. Dans cet ordre d’idée, les principaux domaines d’activités des migrants avant de réaliser le voyage sont le commerce (vente de produit divers dans les marchés locaux), le transport (conduite de taxis, de camions, de motocyclettes, etc.), la mécanique (réparation de véhicule de tous genres, généralement dans des ateliers où le candidat à l’émigration exerce comme apprenti-mécanicien ou même propriétaire), la construction (le secteur BTP et les travaux sur des chantiers divers d’ouvrages publics ou privés), l’artisanat et l’agriculture. 

Selon le genre, plus des deux tiers des migrants et des candidats à l’émigration clandestine depuis les pays d’Afrique subsaharienne sont des hommes. Cependant, la mobilité féminine constitue une réalité indéniable du phénomène migratoire contemporain. Car, à côté des flux réguliers de migrantes, les femmes et les filles sont de plus en plus visibles dans les dynamiques migratoires irrégulières, notamment au niveau des frontières de plusieurs pays de la sous-région ouest africaine qui deviennent des zones de transit avant la poursuite du trajet en direction du Maghreb et des pays européens.

13 janvier 2022

BIBLIOGRAPHIE

Commission Européenne (2015). The European Union’s cooperation with Africa on migration. [Disponible sur https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/MEMO_15_4832]

Coulibaly, O. K. (novembre 2016). La migration africaine, état des lieux, résumé du rapport.  Étude menée par Asiedu Alex, Ezzine Abdelfattah et Tandian Aly pour MADE et Caritas Sénégal. [Disponible sur internet]

OIM (2019). Rapport sur les migrations dans le monde 2020. [Disponible sur https://publications.iom.int/books/informe-sobre-las-migraciones-en-elmundo-2020]

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